« Le soutien mutuel m’a encouragée et réconfortée ».

Romont
Un programme européen d’éducation et de soutien proposé
dans les différentes régions de Suisse

24 HEURES

Mieux vivre avec le cancer

Des cours de soutien et d’éducation aux personnes atteintes par la maladie s’ouvrent la semaine prochaine à Lausanne.

PROGRAMME «Le but de ce programme n’est pas de créer un groupe thérapeutique, mais de donner des pistes et des ressources pour apprendre à vivre avec la maladie ». Myrjam Kleiner et Philippe Glemarec rencontrent quotidiennement des personnes souffrant d’un cancer. Infirmière et infirmier en oncologie, ils ont depuis longtemps constaté les lacunes en matière d’information et d’éducation auprès des patients. Et, surtout, l’absence d’un groupe ouvert à toutes les formes de la maladie. Alors, il y a quelques mois, ils ont décidé de participer avec deux autres collègues lausannois au programme de soutien et d’éducation «Apprendre à vivre avec le cancer ».

Créé en 1992 en Suède, il est désormais présent dans une quinzaine de pays d’Europe. II s’adresse aux patients comme à leur entourage. Dès la semaine prochaine. Deux sessions de huit cours échelonnés sur deux mois débuteront à Lausanne.

Informer et éduquer
« Ces cours sont faits pour apporter des réponses aux questions que se posent les patients sur leur maladie, mais aussi pour la démystifier, explique Myrjam Kleiner. Au long des huit séances que compte le programme, les participants recevront la visite tant de professionnels de la santé que d’intervenants extérieurs. Á l’affiche : un médecin oncologue, mais aussi un coiffeur ou encore un art-thérapeute se succéderont devant les patients et leur entourage « pour leur expliquer, par exemple, comment cuisiner ou se relaxer », note Myrjam Kleiner. Implanté en Suisse depuis 1997, le programme «Apprendre à vivre avec le cancer» est présent dans plusieurs régions de Suisse romande ainsi qu’en Suisse alémanique. II reçoit notamment le soutien des Ligues cantonales contre le cancer.

Journal 24 heures, V. My

LA LIBERTÉ

Ces patients qui ont appris à surmonter leur peur liée au cancer

VECU • Deux infirmiers, Sophie Grand et Frédéric Fournier, ont mené à bien leur programme d’information aux patients atteints de cancer. Vingt personnes confrontées à cette maladie ont échangé leurs expériences durant deux mois. Émouvant.

Surmonter les peurs liées au cancer et oser en parler sans tabou voilà le défi que proposaient Sophie Grand, infirmière à l’Hôpital intercantonal de la Broye, et Frédéric Fournier, infirmier à l’Hôpital cantonal de Fribourg (La Liberté du 13 août 2002). Durant deux mois, ces deux spécialistes en oncologie ont piloté un groupe de rencontre a l’Hôpital cantonal de Fribourg placé sous le thème «Apprendre a vivre avec le cancer»

Vivre et non pas survivre. La nuance pour Sophie Grand et Frédéric Fournier est d’importance. Voilà pourquoi les deux infirmiers ont invité non seulement des médecins oncologues, mais aussi une diététicienne, une coiffeuse ou encore une art-thérapeute à venir s’exprimer. Á l’heure du bilan, les dix-huit personnes qui les ont suivis dans cette aventure en ressortent comme des alpinistes victorieux d’un 8000! L’émotion se lit dans leurs yeux, comme dans ceux d’Annelise, touchée par le cancer. «De pareilles rencontres sont indispensables», lâche-t-elle avec enthousiasme. «Quand on est concerné par le cancer, parler s’impose comme une nécessité. Dans le groupe, on a pu causer de tout : de la maladie bien sûr, mais aussi de l’annonce du cancer ou encore de son acceptation par les proches.»

Annelise se rappelle encore du jour où elle a reçu la terrible nouvelle en pleine figure. « Ils ont fait cela sans tact», déplore-t-elle. «C’était comme si j’étais au tribunal». L’émotion est là. François, qui sort de 16 semaines de chimiothérapie, se remémore les rencontres. II ne peut retenir ses larmes. II faut dire qu’en cours de route, le groupe a laissé deux camarades au bord du chemin…

«Bien sûr, dans la vie quotidienne, les amis nous aident », constate-t-il. «Mais ils n’ont pas les réponses de ceux qui ont vécu les chimios ! Dans nos rapports avec les soignants, on n’a pas non plus les bonnes questions au bon moment. Ce programme de soutien fournit de vraies réponses. Et aussi de grands espoirs, parce qu’il nous fait mieux découvrir les armes pour lutter. »

Frédérique, une aide-soignante originaire d’Afrique, abonde: «On ne voulait pas de théorie. Chez nous, on dit que seule celle qui a connu les douleurs de l’enfantement peut en parler en connaissance de cause. »

« Vous avez l’impression, en tant que malade, que tout se dérègle en vous. Vous vous sentez perdu. »

Face au soignant en blouse blanche, Annelise sentait un certain désarroi. «J’ai appris pendant ce cours à noter mes questions sur une feuille», explique-t-elle. «Rien que l’idée d’appeler mon médecin par téléphone me panique. Cette technique – qui n’a l’air de rien – me permet de gagner en assurance et de ne rien oublier. »

Didactique rigoureuse
Malgré son apparente décontraction, le programme de soutien proposé obéit à une progression didactique rigoureuse, articulée autour de huit thèmes inspirés des travaux d’une infirmière suédoise spécialiste en oncologie, Gertrud Grahn. Dans le premier volet consacré au corps humain et au cancer, les participants ont pu accéder à des explications simples et vulgarisées.

«Franchement, ces milliards de cellules, ça m’a paniqué», lâche François. «Vous avez l’impression, en tant que malade, que tout se dérègle en vous. Vous vous sentez perdu.»

Au départ les personnes hésitaient à se confier. Mais dès la quatrième séance, avec l’approche du thème de la famille, l’ambiance s’est décrispée. Á tel point qu’il a été possible d’aborder des thèmes extrêmement délicats comme la sexualité. Marie-Thérèse, compagne de François, mais aussi Frédérique, ont apprécié la séparation entre malades et accompagnants. «Des témoignages forts ont pu ainsi sortir », se souvient Marie-Thérèse. « Comme celui de cette dame dont le mari s’était complètement fermé sur lui-même à l’annonce de la maladie. Ou encore cet autre qui a attendu dix jours avant de dire à ses proches ce dont il souffrait! »

Éviter l’enfermement
Éviter l’enfermement, voilà un leitmotiv qui revient souvent chez les intervenants. «Lorsque vous suivez une chimiothérapie, vous devenez très faible», poursuit François. «Et ça, les proches ne le comprennent pas toujours. Ce cours leur donne de précieuses informations sur un traitement qui, paradoxalement, vous rend plus malade que vous ne l’étiez auparavant. » Comment fait-on pour tenir le coup? Comment apprend-on à accepter l’autre malgré la dégradation physique? Frédérique livre sa recette tirée de la sagesse populaire. «Le cancer, comme on dit chez vous en Suisse romande, on doit faire avec! », déclare-t-elle. «Avoir la foi aide aussi. Je suis croyante et ça me donne du courage ». Participer au cours n’était cependant pas chose facile. En effet, son mari venait de faire une rechute. « Sa famille était révoltée parce que les médecins n’avaient pas vu sur le scanner que son cancer repartait. Durant ce cours, j’ai pu rappeler aux autres que, malgré tous les instruments, la médecine ne peut pas tout. J’ai aussi apprécié l’humilité des praticiens qui se sont exprimés sur le sujet, notamment de la doctoresse Danielle Wellmann, radio-oncologue.»

Jeune et concernée par le cancer…
Étudiante à l’École cantonale de degré diplôme (ECDD), Valérie a suivi les huit séances d’ «Apprendre à vivre avec le cancer». Par intérêt professionnel, mais aussi parce qu’elle est concernée de près par la maladie : son oncle et son cousin ont été touchés par ce fléau. « Ces cours sont vraiment tombés à point nommé pour moi », confie-t-elle. « Quand vous êtes jeune et pas concerné par le cancer, tout cela vous semble bien étranger. Vous considérez cette maladie comme un mal quelconque, une grippe. Mais quand vous êtes touché vous ou votre famille, c’est le désarroi». La jeune étudiante dit avoir gardé des contacts étroits avec les participants. Pour elle, c’est un nouveau réseau d’amis qui s’est tissé. «Un réseau fragile, comme la toile d’une araignée, mais tellement beau».

L’expérience continue à Payerne
Comme les participants, les intervenants auront aussi le droit d’exprimer leurs jugements sur le programme «Apprendre à vivre avec le cancer ». «Nous les rencontrerons le 20 Février», confirme F. Fournier. « Cette expérience nous a permis d’exercer notre métier d’infirmier sans avoir les contraintes liées à l’institution qu’est l’hôpital, sans être frustrés par la pression du rendement et des économies».
Heureusement, l’aventure lancée par les deux infirmiers aura une suite. L’Hôpital intercantonal de la Broye accepte de soutenir une deuxième édition. Elle débutera le 29 avril à Payerne, à l’EMS des Cerisiers. Quant à l’hôpital cantonal de Fribourg, sa direction n’a pas encore décidé si l’expérience allait être reconduite.

La Liberté du 08.02.2003, Pierre-André Sieber

LA GLÂNE

Programme de soutien et d’éducation à l’HSF
Apprendre à vivre avec le cancer

Extrêmement répandu puisqu’il constitue le 25% des maladies, le cancer débouche souvent sur des situations douloureuses, sur le plan personnel et sur le plan familial. Persuadées qu’un accompagnement particulier ne peut être que bénéfique au traitement de cette maladie redoutée, deux infirmières de l’Hôpital du Sud Fribourgeois (HSF), Janine Buchs Roulin et Sandra Chenaux, spécialisées en oncologie, ont décidé, en collaboration avec l’HSF et la Ligue fribourgeoise contre le cancer, de proposer un programme de soutien et d’éducation destiné aux personnes vivant une maladie cancéreuse, ainsi qu’à leur famille et à leur entourage.

Conçu à l’université de Lund (Suède) à la fin des années 90 par une infirmière, Gertrud Grahn, ce programme a déjà été diffusé en 2002 à l’Hôpital de Châtel-Saint-Denis par la doctoresse Patricia Vuichard et un infirmier, Yvan Bourgeois. L’expérience, très rapidement, a débouché sur la volonté d’en étendre la diffusion aux trois sites de l’HSF.

Le programme « Apprendre à vivre avec le cancer » débutera ainsi le mercredi 14 avril prochain à l’ancienne école primaire de Riaz (à côté de l’église), à travers un cycle de 8 séances qui se poursuivront jusqu’au 2 juin 2004. Huit sessions hebdomadaires de deux heures permettront à une vingtaine de personnes (deux groupes de dix) au maximum d’aborder les divers thèmes du programme, présentés chacun par deux intervenants.

Le premier thème, présenté par Sandra Chenaux et Janine Buchs Roulin, aborde une problématique de base, le corps humain et le cancer. Les deux infirmières, matériel à l’appui (microscope et mannequin) décriront l’évolution des cellules et approfondiront la découverte du corps humain. Pour le diagnostic et les traitements, la Dresse Patricia Vuichard, oncologue, décrira la procédure médicale, souvent trop longue aux yeux des patients.

La diététique et les problèmes de santé seront confiés à Sophie Progin, diététicienne, et Erwin Berger, perruquier, qui préciseront les effets secondaires liés aux traitements, la chimiothérapie notamment. Pour parler du cancer et du rôle de la famille, il sera fait appel à Gabriel Dougoud, assistant social, et Christiane Schmidt, infirmière spécialisée en soins palliatifs à l’Hôpital de Châtel-St-Denis. La dédramatisation du mot « cancer », l’examen des phénomènes de crise, l’acceptation ou la non-acceptation du diagnostic, l’idée de la mort aussi, sont les thèmes forts de ce chapitre.

Pour développer les aptitudes aux changements et la prise de conscience du corps, l’assistant social Gabriel Dougoud et Jean-Luc Andrey, physiothérapeute, expliqueront comment faire face aux nouvelles situations, qu’elles soient professionnelles ou familiales et mettre sur pied de nouvelles stratégies pour faire face à la maladie.

Frédéric Fournier, clinicien oncologue à l’Hôpital Cantonal, et André Labhart, physiothérapeute, aideront les patients à préciser les objectifs pour s’adapter aux changements (relaxation, idées et sensations). Liés à la vie de tous les jours, ces objectifs peuvent être réalisés à travers des démarches simples, telle l’action d’aller dire bonjour à ses collègues de travail.

Deux assistants sociaux, Benoît Delacombaz et Gabriel Dougoud, accompagnés de Brigitte Straubhaar, art-thérapeute à l’Hôpital de Billens, développeront les thèmes du soutien et des ressources sociales, ainsi que l’expression par l’art, qui conduiront les participants vers des activités créatrices. Enfin, lors de la huitième session, la Dresse Patricia Vuichard évoquera la recherche en cancérologie, qui s’attache à élaborer des médicaments aux effets secondaires moins violents, et les médecines alternatives et complémentaires.

« Un tel programme correspond à un besoin. Nous en avons la certitude. Plus les personnes adhèrent à leur traitement, expliquent leur situation à leur famille, et plus les effets sont bénéfiques, par exemple lorsque les patients subissent un traitement aussi pénible que la chimiothérapie », note Janine Buchs Roulin.

Journal La Glâne, 1er avril 2004
Jean-Pierre Graf